"En ces temps troublés, chacun foulait son enfance sur des pavés de regrets" Armelle Carbonel
C'est un peu de tout cela que va nous parler Sandrine Roy dans "Dessiner les nuages". Et de bien plus encore...
De temps troublés. L'Occupation Allemande en 1943 dans le Tarn et Garonne à Angeville. Les peurs, les horreurs, l'ambiance oppressante que cela engendre.
Le mélange total d'inhumanité de certains, heureusement compensé par la merveilleuse humanité de personnes solaires.
D'enfance.
Celle de Malo qui, dans sa tête, est toujours resté un enfant.
Le simple d'esprit comme on l'appelle au village, le benêt qui vit dans la forêt parmi ses animaux.
Malo qui ne grandissait pas dans sa tête et dont le corps grandissant suivait un autre parcours que le sien. Malo tellement fort physiquement et tellement fragile à la fois. Un être pur pour peu que l'on apprenne à le connaître.
Celle d'Antoine, jeune garçon recueilli par Malo, retrouvé vivant dans une tombe. Enfant d'abord mutique, qui va se lier d'une immense affection pour Malo, pour les animaux, pour la nature. Enfant qui a une passion pour la couleur. "Le bleu du ciel, le rouge et l'orange du couchant, le blanc et les dégradés de gris et de rose". Cet enfant qui ne voit que la beauté et la féérie des couleurs dans la pire des tourmentes. Cet enfant qui dessine les nuages et rêve devant la voûte céleste.
Dans ce roman se côtoient la Grande Histoire et les petites histoires.
Celles qui parlent d'amour: l'amour d'un enfant pour le "simple d'esprit" qui l'a pris sous son aile, l'amour sans espoir de Malo pour Rachel, l'amour de la nature, l'amour des animaux, l'amour des mains tendues en ces temps troublés.
Celles qui parlent d'humanité: l'humanité d'un instituteur face à un jeune enfant à qui il tend la main et dont il influera sur le destin, l'humanité d'un soldat allemand pour Malo, d'un médecin, d'un ami, d'un résistant, d'un inconnu, de celles qui nous font croire dans le genre humain.
Celles qui parlent d'amitié: les amitiés improbables qui se nouent, dans une cour d'école, dans une forteresse prison, lieu d'horreur, tenu par les allemands, entre des enfants ou des adultes que tout sépare.
Celles qui parlent de l'horreur aussi, qui se trouve là où on ne le voit pas, sous les traits de personnes si respectables et aussi dans le quotidien d'une guerre effarante et des ignominies commises en son nom.
C'est un roman poignant, percutant par les faits qu'il nous relate.
C'est également un roman solaire par l'amour qu'il dégage.
Je choisirai de ne retenir que l'amour.
Je me souviendrai que les apparences sont trompeuses et qu'il ne faut pas se fier aux préjugés.
Qu'un "simple d'esprit" peut être et devenir un héros.
Qu'un enfant peut dessiner les nuages en couleurs pour transcender le quotidien.
Qu'un instituteur peut changer un destin.
Que les petits histoires ont leur importance et forgent la Grande Histoire.
Un roman bouleversant, triste, percutant, lumineux et solaire.
Toutes les facettes et couleurs de la vie 🙏
⛅ Résumé ⛅ Angeville. 1943. Malo, un jeune homme simple d'esprit, vit depuis des années en retrait du village, dans une cabane au milieu de la forêt. A l'arrivée des Allemands, il va recueillir Antoine, un enfant retrouvé vivant dans la tombe fraîchement creusée d'un couple de Juifs. Sur fond d'antisémitisme et d'Occupation, une relation forte va naître entre eux, dans un village confiné et divisé, où l'innocence de Malo est bien souvent trahie.
Grâce à ses prédispositions pour la peinture et son instinct de protection poussé à l'extrême, Antoine va mettre des touches de couleur dans cette période noire, liant, sans le savoir, la petite et la grande Histoire.
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