Et si nous partions à la découverte de Isabelle Aeschlimann
Elle s'est prêtée pour nous au jeu des questions réponses!
Auteure du magnifique roman "Les secrets de nos coeurs silencieux".
Un énorme coup de coeur pour moi!
Ainsi que "Un été de trop".
Envie de découvrir Isabelle et ses romans ?
🎤 Peux-tu te présenter en quelques mots ?
Je viens d’un petit village du Jura Suisse, ma grand-maman est alsacienne. J’ai un frère de deux ans de moins et une soeur de dix ans ma cadette.
On a toujours beaucoup chanté et dansé dans mon entourage, mon papa était musicien et ma maman maîtresse enfantine. Elle nous a lu des histoires tous les soirs et nous adorions ça. Elle nous emmenait dans les festivals littéraires jeunesse, dans les petits théâtres pour enfants.
Elle m’a donné le goût des livres, de l’art, et la curiosité de la découverte.
J’ai fait des études de commerce puis dans la communication. À 20 ans je suis partie vivre à Berlin quelques années. À 25 ans j’ai rencontré mon mari et j’ai écrit mon premier roman. Aujourd’hui j’ai deux filles de 9 et 12 ans. Je vis en Suisse au bord du lac de Neuchâtel.
🎤 D’où est venue ton envie d’écrire ?
Déjà enfant j’écrivais de petites histoires. J’avais une grande imagination, j’ai fait du théâtre, et j’ai eu envie d’inventer moi-même des histoires.
D’abord cela a été un moyen de sortir tout ce que j’avais dans la tête, toutes les émotions qui se bousculaient et que je n’arrivais pas à gérer.
Maintenant que je gère mieux cette sensibilité, l’écriture est un moyen de me souvenir, et de sensibiliser sur certains sujets, comme dans mon dernier roman qui aborde le sujet de la différence, la malentendance, l’épilepsie.
🎤 Quelles sont tes sources d’inspiration ?
La vie ! J’observe beaucoup. L’écriture permet de prendre du recul, de mieux gérer les émotions. Les poser sur le papier permet de les relativiser, de les évacuer.
Il y a aussi mes lectures et les séries TV, j’analyse les scénarios d’un oeil critique, j’admire les idées, l’inventivité des scénaristes.
🎤 Que représente l’écriture pour toi ?
L’activité qui me ressource et me torture à la fois (rire).
L’écriture comprend plusieurs stades:
> il y a la création et là c’est comme une transe. On se plonge dans un autre monde, dans la tête d’une autre personne, ca permet d’explorer des psychologies différentes, d’essayer de comprendre des comportements, en se mettant dans la peau d’autres personnes.
> Il y a la documentation : j'apprends plein de choses, j'interviewe des spécialistes ou plein de personnes très différentes, pour découvrir d’autres univers et les retranscrire.
> Il y a la correction, la relecture, et là c’est plus compliqué, cela demande beaucoup plus de calme, de concentration. C’est une période plus difficile à organiser au milieu de ma vie de famille et mon emploi. cela devient un combat, mon combat pour trouver du temps et me discipliner car c’est dur, je n’ai plus envie car je créé moins. Je cherche les erreurs de cohérences, je dois changer des scènes, l’ordre des événements, c’est décourageant. Puis soudain tout se met en place, et on voit qu’on touche au but. Ça nous rassure, mais il ne faut rien lâcher car ensuite il y a les micro-corrections qui prennent aussi beaucoup de temps.
🎤 Quels sont les bons et les mauvais côtés en tant qu’autrice ?
Socialement : on doit s’isoler, si on veut passer une bonne journée à écrire et on doit être discipliné, je suis souvent rentrée plus tôt le soir d’une fête pour être en forme le lendemain.
Financièrement : il est très difficile de vivre de l’écriture de roman. Les écrivains ont souvent un emploi à côté. Ce qui est mon cas. Il faut alors jongler entre ces différentes casquettes pour trouver du temps.
Les bons côtés : le peu de matériel nécessaire ! Pas besoin de mille choses pour écrire : je prends mon ordinateur portable, mes écouteurs et je file dans un café dès que deux-trois heures se profilent devant moi. Ou chez moi, en jogging sur mon canapé, si je suis seule chez moi. Et le partage ensuite, les rencontres, les discussions autour du livre ou lors de la construction du livre, les séjours d’écriture avec d’autres auteurs et actrices, le sentiment très satisfaisant de voir naître une histoire qui tient la route et qui va divertir une lectrice.
🎤 As-tu des rituels, habitudes d’écriture ?
Si c’est chez moi, le matin, je me fais un grand café au lait, j’enfile un habit confortable, je mets mon casque sur les oreilles et je lance ma playslist écriture qui m’aide à garder mon cerveau focalisé. La musique empêche toutes les pensées parasites comme p.ex. notre to do list qui clignote dans un coin de notre cerveau.
J’essaie de séquencer mes journées: 1h d’administratif puis écriture, p.ex.
🎤 Combien de temps consacres-tu à l’écriture par jour ?
Ca dépend des périodes et du stade d’écriture. Pendant la période de création, régulièrement je pars une journée entière m’isoler ou mêmes 2-3 jours.
Si je suis lancée dans mon intrigue, je parviens à m’y remettre à 21h quand les enfants sont couchés. Certaines périodes je dors moins, le sommeil devient compliqué, je me réveille la nuit pour écrire. J’ai du mal à « redescendre ».
Et parfois, je n’ai pas le temps d’écrire, car je suis fatiguée ou la vie nous prend trop d’énergie. Je ne vais alors pas très bien, ça me manque, j’ai l’impression d’être submergée. Je m’efforce à m’organiser pour que l’écriture soit à nouveau possible.
Et souvent cela se convient en famille. P.ex, tous les samedi, le papa fait une activité avec les enfants et je prends du temps pour écrire. Mais le temps n’est pas élastique, et c’est pour cela que je mets autant de temps à écrire un livre. Finalement, ce n’est pas grave. Tant que je n’abandonne pas et que je persévère, peu importe le temps que cela prend.
🎤 Quel est ton livre préféré parmi ceux que tu as écrits ?
Mon dernier, car il est le plus proche de moi, de ce que je suis en ce moment.
🎤 Et parmi ceux que tu as lus ?
Je suis une très grande fan de Valérie Perrin, Changer l’eau des fleurs m’a profondément touchée.
Ensuite il y en a des tas. Elena Ferrante m’a fortement interpellé avec l'amie prodigieuse. L’exploration de la complexité d’une amitié, des rapports familiaux, la violence de l’éducation et de la société dans Italie des années 60, j’ai trouvé cela puissant et très courageux.
🎤 Quel personnage de roman aurais-tu aimé être ?
C’est une jolie question, mais je ne vois pas.
Je n’ai pas envie d’être quelqu’un d’autre.
Mais j’admire beaucoup de personnages, comme p.ex. l’évolution de Joséphine dans Les yeux jaunes des Crocodiles de Katherine Pancol ou la force et la complexité de Lisbeth Salander des romans Millenium de Stieg Larsson.
🎤 As-tu d’autres passions que l’écriture ?
J’ai d’autres amours, comme l’art, la peinture, je suis une curieuse, j’aime fureter, me balader et découvrir. J’adore aller à des expo, au théâtre, au cinéma, j’aime les films, j’aime la BD, j’ai même dessiné moi-même des petites BD. Mais je ne dirais pas que ce sont des passions, car l’écriture dépasse de loin tout ça.
🎤 Peux-tu nous parler de ton dernier roman ?
C’est un hommage à la sororité, au lien puissant de la famille, particulièrement entre soeurs et entre mère et filles.
J’avais aussi envie de parler de la difficulté à trouver sa place dans sa propre famille et dans la société, quand on vit dans un village et qu’on nous attribue des étiquettes.
Que se passe-t-il si soudain si on ne veut plus faire ce qu’on attend de nous ?
Si nous aimerions explorer d’autres facettes de notre personnalité ?
Souvent nous sommes incompris et c’est difficile de s’affirmer. En tant que mère de famille, il y a des attentes de notre entourage, ce n’est pas facile d’être soi.
🎤 Que lis tu en ce moment ?
J’écoute La Mariée portait des bottes jaunes et je lis Connemara de Nicolas Mathieu. Mon prochain sera À travers ton sourire le silence résonne, de Alexandra Roch.
🎤 Un mot pour terminer ?
Un énorme Merci Françoise pour toutes les inspirations lectures et bonne suite à vous toutes, chères lectrices, vous êtes plus fortes que vous ne le pensez.
